dimanche 14 septembre 2014

Guy Turcotte: cas unique OU problème de civilisation?

Commentaire sur le texte de Lise RAVARY du 12 septembre 2014 «Turcotte: justice différée, justice niée». Je suis d'accord sur le fait que la justice différée, c'est comme l'absence de justice. Par exemple, comment pourriez-vous retirer un permis de conduire une automobile 4 ans après une négligence grave commise sur une autoroute, causant décès d'homme? Imaginez qu'une cause puisse cheminer durant 4, 7 ou 10 ans ou plus, avec les délais et les appels. Mais je suis d'avis que dans les cas de meurtre, comme celui de Guy TURCOTTE, c'est toute la question de la non-responsabilité criminelle pour problème psychiatrique qui est à remettre en cause. Dans les faits, la société devrait modifier le Code criminel et envoyer un message clair. Tu as eu une folie passagère, mais tu vas avoir un encadrement à vie, même en liberté.

C'est sur un point précis que je réagis ici au texte de Mme RAVARY. Elle écrit:
«Le cas de Guy Turcotte est unique. Tant par l’horreur de son crime – poignarder ses propres enfants pour punir leur mère dépasse l’entendement – que par l’échec que fut le premier procès» (blogues.journaldemontreal.com, 12 septembre 2014).
Le vrai problème n'est pas le fait que le cas TURCOTTE soit unique, mais l'absence de suivi permanent auprès des criminels dits «non responsables». Le message contraire au sens commun et à la protection des citoyens d'un pays est le suivant: Parce que tu es malade, tu peux retrouver une totale liberté... Pas très équilibré comme confusion conclusion. Parce que tu n'es pas responsable, nous n'avons pas besoin de t'encadrer (illogique!). Ça c'est vraiment malade comme conclusion juridique.

En créant des cas pseudo-uniques, la justice devient inapplicable et incompréhensible

C'est comme s'il y avait 10 degrés de légitime défense. Cela serait ingérable et mènerait à des illogismes. Bref, dans les causes avec problèmes psychiatriques présumés (possibles ou évidents) le droit récolte ce qu'il a semé. 

Je comprends que l'on puisse dire qu'une personne puisse être non criminellement responsable pour problème psychiatrique temporaire (instant de folie d'une personne exploitée sexuellement, dépression sévère) ou permanent (schizophrénie sévère, démence) et qu'on puisse se dire qu'une telle personne ne doit pas se retrouver en prison avec les criminels «normaux» (comme si ça existait...). Mais il y a des limites à la folie du système canadien (duquel relève le Québec).

La boussole déréglée

Mais la tendance que le public croit observer, à tort ou à raison, fruit des chartes des droits appliquées sans discernement, résulte en ce que 
  • tout ce qui est trop méchant et impulsif tend avec les années à devenir une maladie (non responsable); comme les meurtres hors du commun, la pédophilie, etc. 
  • et le meurtre standard continue de recevoir la peine (responsable). 
  • Donc, le plus violent de deux cas, le «non responsable» qui a torturé, peut se retrouver en liberté avant le criminel qui a planifié son crime et tué rapidement. Cela est inacceptable socialement. Le criminel malade ou pseudo-malade impulsif qui disjoncte ne doit pas être libre avant l'autre; c'est contre toute logique. 
Imaginez que vous ayez un MAGNOTA (le dépeceur de Montréal) en liberté en 2017, avec une médication à prendre dans son pilulier et une connexion internet très haute vitesse dans un appartement payé par l'assistance sociale... Pourquoi lui pourrait-il bénéficier de pareils privilèges et libertés et pas l'autre? C'est ce que crée le système actuel, aux yeux des citoyens.


Assassiner devrait impliquer un niveau de restriction (encadrement) à vie, même durant la période de retour à la «liberté»

C'est ici que la rectitude de la loi (code criminel) basée en plus sur des avis d'experts achetés à la carte s'arrête. 

  • Aucun Turcotte de ce monde, pauvre ou de l'élite, ne devrait retrouver une liberté 100% normale après avoir commis 2 meurtres. 
  • Aucun fils de tortionnaire d'enfants non plus (même si lui-même a déjà été une victime). 
Le genre de dérapage juridique qui semble relié à une mauvaise application des chartes des droits, est ce que nous voyons aussi dans un autre pays avec un droit semblable, avec le cas de Pistorius, le médaillé olympique. Parce qu'il a des troubles anxieux, l'homme peut décharger une arme à travers une porte de salle de bain parce qu'il entend du bruit, sans s'arrêter après deux balles pour voir qui est derrière la porte. Une semblable diminution de la responsabilité basée sur la non préméditation serait possible au Canada aussi, avec le Code criminel actuel. 

La non-responsabilité ne justifie pas la liberté sans contrainte

L'exemple du criminel victime

Prenons un exemple de jugement par compassion, celle du criminel victime. D'une part, le fils d'un éventuel tortionnaire qui devient violent à son tour a une part évidente attribuable à son environnement. Il a grandi étant lui-même exploité et privé d'amour. Tout le monde peut comprendre cela. Mais le fait que son développement ait influencé sa vie de façon négative et tordu son caractère humain, ne justifie pas qu'après l'exploitation et la maltraitance d'enfants à son tour, qu'il se promène en liberté avec une prescription médicale et une visite du psy par six mois. S'il a commis un crime grave, il doit être encadré à vie, et là, la charte des droits trouve sa limite à ne plus franchir.

Petit meurtre, gros meurtre

On ne peut pas commencer à distinguer des dizaines de niveaux de meurtres: meurtre d'enfant, meurtre de vieillard, meurtre de jeune adulte, meurtre de riche, meurtre de pauvre, meurtre de boomer, meurtre de femme par un homme, meurtre de femme par une femme, meurtre d'immigrant, meurtre dans une communauté ethnique qui applique d'autres règles, ... 

Le message doit être plus clair et il faudrait en venir là: il y a au Canada, des pas à ne pas franchir et le meurtre en est un, sauf tuer en situation de légitime défense, d'invasion de domicile. Mais, à problème spécial (psychiatrique occasionnel ou permanent) il faut un cheminement spécial, et non le vide dans lequel se retrouve l'ex-chirurgien cardiaque Guy Turcotte, qui aurait disjoncté suite à un épisode dépressif sévère, pour avoir été cocufié. À tout le moins, un assassin relâché devrait être encadré d'un suivi plus ou moins resserré durant toutes les années de vie qu'il lui reste. 

Avocats d'entrée de gamme, avocats de la haute société

De plus, une cause impliquant un meurtre ne doit pas reposer autant sur la qualité ou la rémunération que peut espérer toucher l'avocat de la défense (très lié au statut social du client) et sur le choix des experts appelés en témoignage.

Bref

Tu as assassiné une personne? Peu importe la raison et la condition mentale (sauf pour légitime défense), tu fais maintenant partie d'une classe de citoyens à part. Ta vie ne sera plus jamais la même, tant pour sa partie en prison ou en institution psychiatrique, que pour sa partie ou ses périodes en liberté. Voilà ce que doit faire une loi qui respecte ses citoyens autant que les droits individuels. Peu importe les statistiques de récidive. Là n'est pas le point. Tu as tué, tu entres dans une catégorie différente de la moyenne des gens. Oui tu pourras peut-être refaire ta vie. Pour la sentence et les conditions d'encadrement après libération s'appliqueraient les degrés de meurtres et niveaux de responsabilité (ex. premier et deuxième degré, préméditation, non-préméditation, responsabilité vs non-responsabilité), mais parce que tu as assassiné, tu devras toujours (prison ou liberté) être encadré et respecter des conditions minimales adaptées à ta situation (maladie ou pas). En assassinant une personne ou en tentant de l'assassiner, tu as restreint à vie, ton niveau de liberté. Voilà ce qu'il faut.

Autrement, c'est la perte, déjà constatée, de confiance dans la justice et là ça peut aller très loin; même justifier la violence de tous ceux qui ont une cause et se croient lésés. Le laisser-aller actuel pave la voie à toutes les justifications du crime et même le système démocratique peut basculer dans l'anarchie et la justice par soi-même (auto-justice, vengeance) qu'on observe dans des milliers de films américains.