lundi 27 mars 2017

Terrorisme : qui sont les loups solitaires?

Les vrais «loups solitaires» n'existent pas dans la dynamique terroriste selon plusieurs spécialistes américains de la lutte au terrorisme. Ils participent toujours à une forme de réseau.

(dernière modification: 1 novembre 2017)

La notion de loup solitaire rassure, en ce qu'elle suggère l'idée d'une personne qui agit non de façon structurée, mais de manière impulsive et isolée. La thèse d'un individu en crise peut rassurer, tandis que la possibilité d'une menace organisée et déjà en réseau parmi nous inquiète. Aussi, les journalistes aiment bien parler des «loups solitaires» lors des attentats de souche islamiste ou attentats déjoués au Canada. Même chose aux États-Unis. Pourquoi? Peut-être par peur d'avouer que l'Amérique du Nord pourrait, dans un certain nombre d'années, vivre la même situation que l'Europe. Ou par peur d'avouer que des attentats plus importants sont probablement déjà en préparation.


Le 28 juin 2016, une commission sénatoriale américaine s'est penchée sur la question du terrorisme et du vocabulaire en usage dans les agences impliquées en sécurité nationale (1). Je vous propose de courts extraits transcrits en français.

Qu'en est-il des loups solitaires?

Selon les enquêtes et surveillances auxquelles a eu accès le Département de la Sécurité intérieure (Homeland Security Department) aux États-Unis, dans le concept du terrorisme, il n'existe pas ce que l'on désigne par la métaphore du «loup solitaire».

Extrait du témoignage de Philip B. Haney

Philip B. Haney (timeline 01:18:13)
«Les réseaux sont composés d'individus et d'organisations. Et les individus n'existent pas sans un réseau d'organisations. Il faut regarder les deux. C'est pourquoi il n'existe pas de terroriste loup solitaire parce qu'ils ne fonctionnent pas dans le vide en dehors de la structure de la communauté, tout comme les planètes ne tournent pas autour du soleil sans la force gravitationnelle pour les maintenir en place» (2).

Extrait du témoignage de Andrew C. McCarthy

Andrew C. McCarthy (timeline 02:39:56)
«Maintenant, à l'égard de l'État islamique, nous savons que l'organisation a rendu claire, ses aspirations de voir des djihadistes en places aux États-Unis et ailleurs en Occident, commettre des actes terroristes qu'ils pourraient, vous savez, créditer à ISIS pour en tirer avantage. Mais j'aimerais vous suggérer que c'est l'idéologie, plus que l'organisation, qui agit comme source d'inspiration» (3).

Andrew C. McCarthy (timeline 02:39:33)
«Sénateur, je pense que l'ISIS comme Al-Qaida, comme d'autres organisations terroristes, est moins important que l'idéologie qui les transcende et les surpassera tous, et c'est [l'idéologie] ce qui est en fait le catalyseur ici». (4)

M. Zuhdi Jasser va dans le même sens mais en réaffirmant que soit par assentiment idéologique, soit par influence directe d'une organisation (adhésion formelle), le résultat est qu'il n'y a pas de loup solitaire. Voici sa déclaration sur les terroristes qui semblent agir seuls.

Extrait du témoignage de M. Zuhdi Jasser


M. Zuhdi Jasser (timeline  02:42:30)
«Si je peux aborder quelque chose qui me paraît vraiment très important, c'est que, comme vous le savez, ISIS prenant le crédit, c'est comme si le coq prenait le crédit pour le matin [...]. Ce ne sont pas des loups solitaires. C'est une idéologie mondiale qui touche les personnes vulnérables pour quelque raison qu'elles soient vulnérables» (5)


Le terrorisme est un moyen et non une fin


Si on peut contextualiser pour mieux comprendre la suite: disons qu'un schizophrène ou une personne en délire qui part à la chasse aux gens avec un objet sans vouloir promouvoir une idéologie et de manière non planifiée n'est pas un terroriste. Il ne faut pas, par exemple, confondre le délire ou la vengeance d'un individu congédié, avec l'acte terroriste, lequel implique une action consciente et ayant un minimum de planification et fait la promotion d'une idéologie ou d'une cause que partagent certains individus. L'acte terroriste fait partie d'un agenda (vise un but), même si la personne qui passe à l'acte consciemment, peut ne pas être en bonne santé mentale dans certains cas. C'est ce que M. Zuhdi Jasser vient de décrire.

Le terrorisme est un moyen de tenter de réaliser un but idéologique ou politique commun à des individus et non une fin. Dans l'action terroriste même si l'individu qui passe à l'acte est isolé, il fait partie d'un réseau, par exemple, il peut avoir eu de la formation ou être un «dormant» qui attend les directives; directives qui peuvent même être relayées par un média qui diffuse un appel à passer à l'acte.

Dans le concept du terrorisme, il n'existe pas ce que l'on désigne par la métaphore du «loup solitaire». Crédits photo : capture image, éditée et modifiée, tirée de Youtube https://youtu.be/Ivj8qVOq9ug


La charia (loi religieuse) transcende les organisations comme l'État islamique ou al-Qaïda

Andrew C. McCarthy (timeline 02:40:24)
«Je voudrais aller un peu plus loin et simplement souligner la gravité d'un problème avec leur adoption avec la charia. Nous pourrions tuer chaque membre d'ISIS demain et cela n'aurait pas d'incidence sur le mouvement islamique mondial. Cela n'affecterait pas le Jihad mondial. Il ralentirait jusqu'à ce qu'ils se soient rattrapés». (6)

La progression de la charia (son influence et son application sans l'aval officiel des nations d'accueil) serait le cheval de Troie dans nos démocraties occidentales


En fait, on peut déduire du témoignage de Andrew C. McCarthy devant la Commission, que la promotion de la charia serait le cheval de Troie utilisé stratégiquement pour modifier le droit dans nos démocraties occidentales. Et contrairement à la croyance médiatique et politique (du moins ce qu'on veut faire croire aux populations), il n'est pas besoin qu'une tradition de la charia soit enchâssée dans nos textes de loi pour être appliquée de manière modulaire. Par exemple, des entités ou individus peuvent encourager la polygamie et imposer le port du voile ou l'excision, ou encore pratiquer une justice parallèle comme ce que nous appelons ici le «crime» d'honneur qui pour ceux qui le pratiquent est un droit islamique, sans le déclarer ou le faire approuver par nos gouvernements. 
  

Le terrorisme implique une démarche politique souvent non religieuse (idéologie particulière) qu'un groupe veut faire avancer ou imposer par la force et l'intimidation


Il faut se souvenir que la notion de «terrorisme» ou d'acte terroriste n'a pas de sens aux fins  des analyses, sans un message politique. Par exemple, nous avons le FLQ au Québec, durant les années 1960 et au début des années 1970, ou l' IRA pour l'Irlande du Nord, ou les Black Panthers aux États-Unis. Le tristement célèbre cas de Timothy McVeigh, un milicien révolté contre l'État (et auteur en 1995 du plus gros attentat terroriste au pays avant le 11 septembre 2001), rappelle qu'il n'a pas agi seul, ni sans une idéologie politique existante aux États-Unis. Si des individus s'en détachent ou se radicalisent à partir de groupes pré-existants, ils continuent d'agir dans un réseau pour communiquer, forcer, imposer un message politique. 

Les cas de maladies mentales (ex. délire paranoïde) ne sont pas des démarches politiques réfléchies et organisées et doivent être distingués du terrorisme véritable. Par exemple, un individu frustré contre ses collègues de travail après avoir été congédié par son employeur et qui décide de commettre une fusillade dans les locaux de l'entreprise ne répond pas à la définition d'un terroriste, ni d'un prétendu loup isolé. Le réseau d'un terroriste peut être petit (ex. trois ou quatre individus interconnectés), mais il peut aussi être étendu et important (ex. des petits groupes d'une école de Montréal qui deviennent des satellites, ou antennes, ou cellules de l'État islamique ou des Frères musulmans, pour en suivre les recommandations et politiques).



À LIRE AUSSI:


Lutte au terrorisme et interférences politiques aux États-Unis

Contre-terrorisme, sécurité intérieure et censure politique. Informations tirées de la sous-commission sénatoriale:
«Debate on "Radical Islam" and Terrorism
A Senate Judiciary Subcommittee on Oversight, Agency Action, Federal Rights and Federal Courts convened a hearing on the use of the term “radical islam” in government documents and combating terrorism strategies». (28 juin 2016)



Canada et États-Unis : Constitutions nationales sous attaque

(4 octobre 2017)



Pourcentage des posts en langue arabe exprimant un sentiment favorable à l'État islamique (19 pays)

Ils sont déjà parmi nous, comme ils étaient déjà parmi nous en 2014.
Déjà au troisième trimestre de 2014, plus de 15 pourcent (%) des posts dans une langue arabe émis depuis un serveur du Canada étaient favorables à l'État islamique.
Pour la même période pour des serveurs depuis ces pays:
  • Aux États-Unis, c'était 21,4 % ou un peu plus de 1 sur 5
  • Au Royaume Unis (UK), c'était 23,8 % ou près de 1 sur 4.
  • En Belgique: 31% ou près de 1 sur 3.
The Guardian s'est basé en 2014, sur un grand nombre de posts sur les réseaux sociaux émis depuis des serveurs dans ces pays. Les posts en langue arabe ont été validés par échantillonnage pour s'assurer que les algorithmes d'analyse informatisée donnaient des résultats suffisamment fiables pour représenter la réalité.



Censure d'un cinéaste de la gauche américaine

En 2012, ce cinéaste de la gauche américaine, Eric Allen BELL, a osé questionné l'islam en constatant les résultats des révolutions du «Printemps arabe». 



Pourquoi la gauche NE comprend pas les dérives de l'islam?

La logique de la gauche est «binaire» en ce sens qu'elle ne permet que deux options; 2 valeurs possibles.

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1.     «Debate on "Radical Islam" and Terrorism
A Senate Judiciary Subcommittee on Oversight, Agency Action, Federal Rights and Federal Courts convened a hearing on the use of the term “radical islam” in government documents and combating terrorism strategies». 28 juin 2016.

Débat sur «l'islam radical» et le terrorisme
Un sous-comité judiciaire du Sénat sur la surveillance, l'action de l'Agence, les droits fédéraux et les tribunaux fédéraux a convoqué une audience sur l'utilisation du terme "islam radical" dans les documents gouvernementaux et la lutte contre les stratégies terroristes.


2.     Philip B. Haney
Officer (Former), Customs and Border Protection, Department of Homeland Security

(timeline 01:18:13)
"The networks are made up of individuals and organizations. And individuals don't exist without a network of organizations. You have to look at both of them. That's why there is no such thing a lone wolf terrorist because they don't function in a vacuum outside the structure of the community, just like planets don't rotate around the sun without the gravitational force to hold them in place".


3.     Andrew C. McCarthy
Assistant U.S. Attorney (Former), Southern District of New York, Department of Justice

(timeline 2:39:56)
Now, specifically with respect to ISIS, we know that the organization has made it quite clear that it would like to see Jihadists in place in the United States and elsewhere in the west commit acts of terrorism that they can, you know, attribute to ISIS and then take advantage of. But, I would suggest to you that it's the ideology more than the organization that is doing the inspiring.


4.     Andrew C. McCarthy (timeline 2:39:33)
Senator, I think that the -- that ISIS like Al-Qaida, like other terrorist organizations is less important than the ideology which transcends them all and will outlast them all and is what is actually the catalyzing feature here.


5.     M. Zuhdi Jasser 
Founder and President, American Islamic Forum for Democracy

(timeline  02:42:30)
«If I can address something that I think is really very important is that, you know, ISIS taking credit is sort of like the rooster taking credit for the morning in that they will put out the virus out there. These are not lone wolves. It's a global ideology that taps into vulnerable individuals for whatever reason they may be vulnerable».


6.    Andrew C. McCarthy (timeline 02:40:24)
Also, I would go a step further and just to point out how serious of a problem this is with their adoption with Sharia. We could kill every member of ISIS tomorrow and it wouldn't affect the global Islamic movement. It wouldn't affect the global Jihad. It would slow it down until they caught up.