jeudi 23 janvier 2014

La fin du diplôme secondaire est proche...

Un article intéressant dans la Presse: «Le diplôme d'études secondaires n'est plus». Un enseignant de français du secondaire, assistait à une assemblée sur les nouvelles normes de diplomation, par exemple, pour passer de la 1ère année du secondaire, à la 2e tout en ayant échoué la 1ère, puis de la 2e à la 3e et ... 

Tout se joue sur
  • le nombre d'unités requis pour diplômer
  • et sur le nombre d'échec qui sont donc tolérés. 
La réalité frappera, selon l'enseignant, en 2017.

Voici des extraits et explications:
 «On nous a présenté, en 40 minutes, un changement qui n'a l'air de rien, mais qui, en réalité, bouscule tout.» [...] 
«C'est le soir même, à tête plus ou moins reposée et avec douze heures de recul, que l'évidence m'a frappé en plein visage: le diplôme d'études secondaires n'est plus. Le papier que les élèves finissants recevront à partir de 2017 n'aura du diplôme que le nom. En réalité, ce sera un permis de travail. Ce n'est pas seulement un changement de vocabulaire: c'est un changement de cap, de vision, de philosophie». [...] 

«On diplômera donc des élèves qui connaîtront moins de choses, qui auront compris moins de notions, qui auront moins réussi, qui seront plus faibles. J'ai instinctivement soulevé devant l'assemblée que c'est toute la valeur du diplôme qui est remise en question. En fait, c'est là que je me trompais

«Un droit de travail

Le diplôme ne sera plus considéré comme une preuve de l'atteinte d'un niveau académique prédéterminé. Il sera un droit de travailler que pratiquement tous les élèves, forts ou faibles, devront éventuellement recevoir. En effet, puisqu'on exige, de nos jours, un diplôme de secondaire 5 pour occuper à peu près tous les emplois, on doit diplômer plus de jeunes si on veut qu'ils puissent travailler.» (1)

J'ai l'étrange sentiment que cet enseignant a su décoder l'information qu'on leur exposait en assemblée, en s'appuyant sur des statistiques. Un point de vue a lire dans LaPresse.ca. Voilà où nous auront mené les grands réformateurs de l'éducation dont certains qui pondent les normes ont passé 30 ans sur les bancs d'école (éCOLLE?), avant de savoir ce qu'était d'avoir un enfant.

Bref, cela signifie que nous aurons un diplôme qui pour les uns, en fonction des cours réussis et des unités cumulées, ouvrira la porte à des études supérieures, et pour les autres, ne permettra que de travailler. Nous aurons un nombre croissant de jeunes adultes diplômés qui souffriront d’illettrisme (analphabétisme fonctionnel); donc capables de lire un texte, mais non de le comprendre. Ou incapables d'écrire un texte cohérent.

Un besoin ressort

En voulant diriger tout le monde vers des programmes post-secondaires supérieurs (la fameuse «société du savoir» ou «l'Économie du savoir» selon une philosophie très en vogue depuis le milieu des années 1990), on a négligé le fait que certains jeunes n'ont pas le bagage, ou même le désir, pour le DEC au cégep ou pour l'université. Ce genre d'ajustement de programmes à la baisse a des effets pervers, et entre autres
  • fait ressortir que tout le monde n'est pas fait pour, ou ne veut pas accéder immédiatement, aux études supérieures (dans certains cas, à moins d'avoir accès à l'aide d'un enseignant privé). Il y a un besoin encore pour des voies alternatives à rétablir, vers des programmes de métiers essentiels plus manuels. Je n'ai pas besoin d'un intellectuel pour réparer la plomberie de ma résidence ou la carrosserie de l'automobile.
  • l'approche ne crée PAS seulement une diminution de la valeur associée à un diplôme de 5e secondaire pour le jeune adulte qui a échoué plusieurs cours (et pour l'employeur éventuel qui le reçoit, pensant qu'il sait lire et interpréter un courriel expliquant une procédure, une norme écrite, un guide, un devis, etc), 
  • il diminue tout autant la valeur de ce diplôme, pour le jeune qui a très bien réussi, surtout s'il ne passe pas immédiatement au niveau supérieur à la sortie du 5e secondaire, ou la valeur du même papier, pour ceux qui ont obtenu ce diplôme des années auparavant, donc avec un plus grand nombre d'unités complétées.
Donc, Vive les cheminements alternatifs plus manuels, les artisanaux, les opérateurs, etc. Qui préférez-vous voir, penché sous l'évier de votre cuisine, un samedi soir, quand le tuyau d'eau a lâché? Un plombier, ou un doctorant en mathématiques qui vaut 10 pour cent sur une échelle d'aptitudes manuelles (0 étant nul, et 100 étant le plus haut niveau)? Voilà les limites de la «l'Économie du savoir». Nous avons besoin non seulement de cerveaux, mais aussi de manuels (construction, et autres), d'artisans, d'opérateurs. Ceci dit, nous espérons aussi qu'ils sachent lire une procédure, une norme, etc.

À LIRE:
Systèmes scolaires d'ici et d'ailleurs: mêmes philosophies, mêmes problèmes (25 janvier 2014)
http://yapasdpresse.blogspot.ca/2014/01/systemes-scolaires-dici-et-dailleurs.html

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1.  Stéphane LÉVESQUE (enseignant). Le diplôme d'études secondaires n'est plus. LaPresse.ca, 22 janvier 2014.
Page consultée le 23 janvier 2014.