dimanche 5 décembre 2010

Cours d'ECR au Québec : l'idéologie derrière le cours d'Éthique et culture religieuse

Le 5 DÉCEMBRE 2010. Le cours d'ECR refait l'actualité ces jours-ci, pour son volet éthique (ou moral) dans l'affaire des questionnaires sur les préférences sexuelles des jeunes de 13 ou 14 ans (2e secondaire), révélée récemment par le Journal de Montréal. Pour Denise Bombardier du journal Le Devoir, le programme semble confirmer qu'il véhicule n'importe quoi (multiculturalisme, relativisme religieux, liberté éditoriale en fonction de l'enseignant et des faits du jour). Ce qui inclut maintenant le «voyeurisme» des agents de l'État dans la vie sexuelle privée, car en plus, des questions très privées sur les expériences sexuelles des jeunes sont amenées dans certaines classes. Au risque de se répéter toutefois, il faut nuancer que le cours d'Éthique et culture religieuse - ECR (ou ÉCR) ne vise pas la promotion multiculturalisme à la "canadian" comme plusieurs le croient.

  1. L'éducation relève des compétences des provinces. 
  2. L'ECR est né d'une approche philosophique testée dans des écoles secondaires de la région de Montréal, à partir de 1977, lorsque le PQ était en pleine gloire après sa première arrivée au pouvoir en 1976. 
En voici les implications pratiques.


Premièrement, je tenterai de vous vulgariser ici, les fondements de l'ECR et leur implication en fonction des libertés religieuse et morale. 

Deuxièmement, nous verrons aussi, comme par une analogie, ce que l'approche donnerait si on appliquait le même traitement phénoménologique à la sphère des convictions politiques.

De telles conditions (philosophie sous-jacente et effets s'il était possible de les appliquer en politique) agissent inévitablement dans le cours d'ECR, le cours étant imposé du primaire jusqu'à la fin du secondaire (de l'âge de 6 ans, à 16 ans environ).

Sur le multiculturalisme 

Que le programme d'ECR ne soit pas conçu comme outil promotionnel du multiculturalisme ne veut pas dire que certains enseignants, établissements ou commissions scolaires ne l'utilisent pas en ce sens. Mais le contenu est avant tout DANS un multiculturalisme et NON POUR le multiculturalisme.

Un programme fondé sur la phénoménologie appliquée à l'étude de la religion

S'il est vrai que l'ECR résulte en un certain relativisme religieux et moral (des valeurs) et que le contenu est facilement dévié par les préférences d'un enseignant, on ne peut en avoir un portrait exact sans comprendre où il est né.



La phénoménologie est une philosophie à peine centenaire développée en Allemagne. Appliquée à l'étude des religions, elle les réduit à la somme de «phénomènes religieux» choisis selon un angle particulier. La méthode et le résultat s'apparentent à une forme de dissection comparée d'un organe de deux espèces différentes. 

À la fin du processus (ici de la première année du primaire jusqu'à la fin du 5e secondaire), toutes les expériences religieuses sont considérées comme soit humaines, soit psychologiques, soit inexpliquées ou inexplicables; des manifestations qui "s'équivalent" en quelque sorte, mais pas au sens positif. Comme pour la dissection de petits animaux dans une salle de classe de biologie, les religions dans la classe d'ECR, y sont comparées par bribes; cessent de former un tout dans les analyses. Le résultat est évidemment trompeur pour un esprit non exercé à ce type d'organisation de l'information, en apparence non idéologique. Il faut savoir que selon la vision phénoménologique des religions, l'individu ne devrait pas être engagé activement dans une religion ou une autre. L'«équivalence» selon l'approche phénoménologique désigne plutôt le niveau de leur source: humaine, psychologique, influence de la culture, etc. La nuance est importante, car l'approche ne dit pas que les religions s'équivalent au sens que tout serait bon, tout se vaudrait, mais plutôt que tout est non surnaturel. Tout tend en général à être ramené au niveau de la culture. Les plus engageantes parmi les religions abordées, sont interprétées comme inférieures et en position de déséquilibre. Les cultes polythéistes et les religions ou disciplines philosophiques sont mieux acceptés que les monothéistes (1).

Les années ayant mené à l'ECR; un bref rappel d'un rapport-clé, ayant mis la table pour la décennie qui allait suivre de 1999 à 2008


Le cours d'Éthique et culture religieuse (ECR ou ÉCR) à l'école s'appuie officiellement sur les recommandations du rapport et des études coordonnées par le Groupe de travail sur la place de la religion à l'école (dépôt officiel en 1999). Selon l'Étude 1 approuvée dans le rapport Proulx (communément nommé ainsi dans les médias, du nom du responsable Jean-Pierre Proulx), l'approche phénoménologique était celle privilégiée par un programme étudié et recommandé comme le modèle idéal : «Son approche s’inspirait surtout de la phénoménologie» (Ouellet et al., 1999, p. 81).

Ces documents officiels ont fourni le cadre et l'orientation de l'Enseignement culturel des religions pour les devis pédagogiques à élaborer. Le nom officiel du cours a été changé pour celui d'Éthique et culture religieuse, question de faire davantage ressortir qu'il aborde aussi les points de vue non religieux (et ajoutons souvent antichrétiens) du monde.


Une prise de position étonnante de l'État contre le sens religieux


Dans son rapport officiel, ledit Groupe de travail sur la place de la religion à l'école a pris une position étonnante, laquelle donnait le ton à la mise en place de l'ECR, pour la décennie qui allait suivre 1999 :
«L’un des moyens de développer l’ouverture et la tolérance à l’école est d’initier l’élève aux différentes cultures et aux différentes religions et de les présenter comme des manifestations de l’esprit créateur humain, tout aussi légitimes que la sienne» (2).
Il est bien spécifié dans l'extrait qui précède tiré du rapport du Groupe de travail sur la place de la religion à l'école qui a conduit au cours d'ECR, que toutes les religions sont «des manifestations de l'esprit créateur humain». C'est uniquement en ce sens, que la légitimité n'est pas davantage avec une religion qu'avec une autre. Autrement dit, soit Dieu n'existe pas, ou même s'il existe, aucune religion ne peut prétendre le représenter, christianisme inclus. Voilà pour la neutralité attendue de l'État. C'est seulement en ce sens, et non comme une promotion de toutes les religions (un multiculturalisme), que nous devons comprendre que les religions se valent dans le cours d'ECR.  La nuance semble avoir échappé à plusieurs des intervenants (médias, groupes de parents, plusieurs politiciens, éducateurs ou mêmes juristes, etc.) non experts en "subtilités" des concepts théologiques et philosophiques.


Confirmation de l'approche phénoménologique

1998-2000

Tel que prévu dès le tournant de l'année 2000, l'assise de l'ECR est donc, dans le même esprit, celle des sciences humaines et plus particulièrement de la phénomélogie de la religion (v. note 3). 

2009
L'approche phénoménologique (déjà identifiée dans les orientations de 1998-2000, surtout par la contribution de l'Étude 1 favorisant l'approche de la phénoménologie de la religion), a été confirmée le 10 juin 2009, par le témoignage devant la cour, du philosophe Georges Leroux, spécialiste et pro-ECR dans le procès qui oppose le collège Loyola contre le Ministère de l'Éducation, du loisir et du sport (MELS).

Le témoin-expert a rectifié en cour, ce jour-là, que l'approche du cours d'ECR envers les religions n'était pas «phénoméniste», mais plutôt «phénoménologique» (Troisième journée du procès de Loyola contre la ministre Michelle Courchesne : Mercredi 10 juin 2009).

2010
Cela confirme exactement ce que j'avais constaté dans les publications gouvernementales de l'époque des consultations limitées et sur invitation. C'est aussi affirmé par le père du Rapport Proulx (rôle majeur dans le contexte du mandat officiel reçu du Gouvernement du Québec et du débat social de 1998-2000) sur la place de la religion à l'école. Pour Jean-Pierre Proulx, l'approche n'est pas laïque. Voici ce qu'il écrit le 28 juin 2010, dans une réponse en commentaire à un article du journal Le Devoir, dans le contexte du jugement Loyola:
«Le programme propose de réfléchir de façon critique à partir de la raison et non de la foi, comme on le fait en philosophie depuis des lustres. Pour ce qui est du volet culture religieuse, l'approche, on le sait, est phénoménologique et elle utilise des outils conceptuels propres à cette perspective» (4).
Sauf que personne ne sait ce que c'est, à part les initiés!


L'approche phénoménologique n'est pas neutre à l'égard des religions abordées


Il est important de savoir que la phénoménologie, une philosophie à peine centenaire, appliquée à l'étude des religions, les réduit à la somme de plusieurs «phénomènes religieux» disparates. Par analogie, elle agit d'une manière semblable à la dissection comparée de différents animaux de laboratoire, réduits à une comparaison de plusieurs petites parties; comme comparer  pour différentes espèces et l'homme, les cerveaux, poumons, coeurs, estomacs, yeux, etc.  Comme il est impossible de connaître ou assimiler plusieurs religions dans un délai de quelques mois ou années, toutes les expériences religieuses sont ainsi réduites de la même manière en petites composantes distinctes. Elles sont alors réduites à un produit soit humain, soit psychologique, soit inexpliqué ou inexplicable; culturel. Résultat de la perte de vue d'ensemble en tant que système: les religions sont traitées comme des manifestations qui s'équivalent plus ou moins. Tout est ramené au niveau de la culture et de la psychologie. À la fin du processus (avec l'approche de l'ECR  = une démarche phénoménologique progressive sur tout le cheminement d'âge mineur de l'élève), les plus engagées parmi les religions abordées, sont considérées comme suivant une approche inférieure et de déséquilibre (ex. le christianisme engagé, les catholiques ou protestants fervents).

Les religions comparées par bribes (phénomènes), cessent de former un tout


Aussi, parce qu'elles sont ainsi démembrées en plusieurs infimes parties qui seront comparées entre elles, la vue d'ensemble de chaque religion est perdue. On peut créer l'impression que tout se vaut plus ou moins. Ou on peut aussi perdre le sens du message. 

  • Par exemple, la naissance de Jésus et sa crucifixion perdent leur sens historique de poursuite des enseignements et Écritures hérités du judaïsme (déconnexion du référentiel historique dans la révélation divine). 
  • La nativité peut alors se résumer à la naissance du bébé Jésus dans une crèche.
  • La crucifixion qui était le but de son incarnation pour racheter les hommes de la perdition (rédemption) et qui n'a pas de sens sans la résurrection, pourrait se réduire à la mort d'un réformateur religieux ou social, au même niveau que la pendaison de Louis Riel en histoire politique du Canada français ou que la fin de Martin Luther King en réforme sociale américaine. L'approche phénoménologique engendre ou facilite ce genre de déformations des comparables : l'exécution ou l'assassinat des réformateurs religieux ou laïcs au même niveau que Jésus-Christ.

Il devient alors facile de comparer les meilleures éléments d'une voie avec les moins bons de l'autre (ex. les bons points du bouddhisme avec les erreurs du catholicisme ou du protestantisme)



En plus, avec le procédé de la dénaturation des religions en tant que systèmes, en les éclatant en pièces détachées (comme la dissection d'un animal en biologie), un effet pervers ou malhonnête, est qu'il devient très facile (trop) de faire ressortir le meilleur d'une religion et le moins bon de l'autre. Par exemple, selon la tendance d'un enseignant, puisqu'il peut puiser dans l'actualité, ce qui est même permis et encouragé par le programme, ce dernier pourrait ressortir des articles de publications présentant les religions orientales de façon positive, et la semaine suivante, amener une discussion en classe, basée sur un article de presse négatif contre certains abus (réels ou présumés) du catholicisme, pour laisser entendre que le christianisme est négatif comparé aux précédentes. Une telle déformation par la sélection de la source et de l'angle, intentionnelle ou non, devient difficile à détecter et à prouver même pour l'adulte (à moins de tenir un registre) et impossible à reconnaître pour un enfant. Ou à moins d'avoir trouvé le principe unificateur des manuels ou cahiers d'exercices : la phénoménologie appliquée à l'étude comparative des phénomènes dans les religions abordées.

L'approche phénoménologique crée donc une déformation que ne permettrait PAS aussi facilement une approche systématique de l'étude des religions. L'approche actuelle consiste en une suite de clips colorés mais superficiels, créant l'impression (fausse) de maîtriser des contenus de sens (et contre-sens) très complexes.

Un «traitement spécial» pour le christianisme prendra place au fil des ans

De plus, le MELS assure qu'une place prépondérante est accordée aux traditions chrétiennes dans le contenu de l'ECR. Sauf que, ce qu'on ne vous dira pas, c'est que les parties où le christianisme sera vu de façon négative, seront comptées dans cette même part "prépondérante" (pseudo-«privilège historique») accordée aux traditions chrétiennes. Par exemple, l'on pourrait s'attarder longuement sur la pédophilie dans certaines églises traditionnelles et taire la pédophilie chez l'élite laïque ou athée qui fait des pressions pour faire abaisser l'âge des premières relations sexuelles d'un jeune avec un adulte, ou cette pression dans les sports et loisirs par exemple.

Encore une fois, le biais (tromperie) est dans le choix de l'angle. Le bouddhisme et l'hindouisme se sont imposés par des conquêtes et ont fait cessé des cultes ou croyances philosophiques qui les ont précédés. Mais parce que ces faits sont plus éloigné de nous, ce genre de vérité historique passe complètement inaperçue.On refuse d'avouer que le bouddhisme fait du prosélytisme (recruter de nouveaux adeptes) alors que des tonnes de livres sont écrits pour sa promotion auprès des élites nord-américaines.

Paradoxalement, selon la vision phénoménologique des religions, l'individu ne devrait pas être engagé  activement dans une religion. L'engagement religieux relèverait d'un déséquilibre. La dévalorisation de l'engagement (ex. engagement chrétien actif) est une prémisse de la phénoménologie et donc un point majeur de non-respect de la liberté de conscience des élèves, des enseignants et des parents. 


Voici une de ses prémisses fondamentales selon un des principaux promoteurs du 20e siècle pour l'approche phénoménologique appliquée à l'étude des religions. Le spécialiste allemand Gerardus Van der Leeuw, un des développeurs de l'approche phénoménologique appliquée à l'étude du religieux,  écrira dans un ouvrage majeur recensant et comparant de multiples expériences ou phénomènes religieux :

     «Dans les religions de l'équilibre maintenu, on ne peut donc parler ni d'une foi personnelle ni d'incrédulité ...» (5).
     «La vie religieuse intérieure prend seulement naissance lorsque l'équilibre est rompu» (6).

La foi engagée ou la conviction serait-elle une une pathologie ? Réponse : Oui. Fernand Ouellet, coordonnateur de l'Étude 1 pour le choix d'un programme-type préfère parler de pathologie sociale.

Une telle conclusion relève évidemment de présupposés philosophiques privilégiés par une certaine élite de «spécialistes». Si une religion est foncièrement mauvaise, alors toutes le sont, car toutes totalement humaines et culturelles. C'est leur Absolu ou leur vérité immuable, non négociable, lorsqu'ils encadrent les autres et font changer les lois,  les chartes et les constitutions des pays. Ai-je besoin d'expliquer pourquoi le National-Socialisme s'est emparé de l'approche phénoménologique dans sa démarche politique pour son projet de IIIe Reich? (par exemple pour justifier le contrôle du clergé et des églises par l'État).

L'approche phénoménologique ne peut donc pas respecter la liberté de conscience religieuse ET DE CONVICTION PERSONNELLE DES INDIVIDUS



En réalité, on peut facilement déceler chez la phénoménologie de la religion, un esprit opposé à la foi engagée (la conviction). L'individu, selon cette position, devrait se tenir toute sa vie en perpétuelle négociation ou perpétuel dialogue et accepter de ne jamais s'arrêter à une position ferme (conviction); d'où le si grand nombre de références au «dialogue» dans la présentation du programme d'ECR. 

Ces spécialistes ont omis que le « vivre-ensemble » (néologisme utilisé abusivement), devrait être la tolérance et non l'élimination de la concurrence. Mais leur « vivre-ensemble » (un néologisme séducteur) devient dans les faits historiques, le «mourir-ensemble» des convictions monothéistes (et parfois dans certains pays durant certaines décennies récentes, la mort au sens littéral ou la mise aux arrêts de ceux qui les portent).

L'approche phénoménologique des religions, les réduit à une somme ou construction de phénomènes. Appliquée à l'enseignement des enfants dans le contexte de l'ECR, elle présente toutes les apparences d'une idéologie philosophique servie par une forme de manipulation psychologique de groupe, au moyen d'une intimidation subtile, en apparence démocratique.

Les mots comme «délibérations», «dialogue», «discussions», «consensus», etc. dans le groupe, sont en fait de la poudre aux yeux. L'enfant a l'impression d'orienter les conclusions des échanges ou discussions, tant que les conclusions vont dans le sens du programme. À l'inverse, si le groupe prend une autre tangente, le bon enseignant-modérateur qui suit vraiment la littérature du programme, devrait ramener la classe aux bonnes conclusions; cela, par un personnage des manuels scolaires ou par les règles explicites à la fin du manuel.

En réalité l'approche ressemble à s'y méprendre, à de la manipulation psychologique. C'est au moment des délibérations au sein d'un groupe que le plus de dommage risque de se produire au niveau relationnel ou des libertés individuelles; par exemple, pour un jeune d'une conviction quelconque qui verra son point de vu méprisé ou risible par la majorité. Ce qui ne voudra pas nécessairement dire qu'il a tort. Les idéologies évoluent. Il y a deux siècles en occident, l'esclavage était perçu comme acceptable par la majorité. Si les croyants comme le député William Wilberforce en Angleterre s'étaient arrêtés au point de vue de la majorité au parlement, l'esclavage aurait perduré durant des décennies encore dans le vaste empire britannique et d'autres pays.

Il ne faut pas oublier que l'approche phénoménologique ayant ciblé les religions jugées contre l'État faisait partie du bouillon philosophique véhiculé par le National Socialisme de l'avant Deuxième Guerre mondiale, soit avant 1939-1945, dans un pays généralement en avance technologique et scientifique sur son temps. Depuis ce temps, l'Allemagne a révisé sa position et la religion n'y est plus nécessairement considérée comme ennemie de l'État. Il y a en effet une différence entre séparer la religion et l'État et éliminer la foi qui se manifeste publiquement. Je ne veux pas dire ici qu'il faille porter le symbole religieux dans un emploi de la fonction publique, mais dans le sens de pouvoir exprimer sa foi hors des lieux de cultes et des chambres à coucher; hors du placard.

Il serait intéressant de voir, ce qu'une approche phénoménologique exigerait des politiciens, si on l'appliquait à la politique québécoise.

Si la phénoménologie (ou approche phénoménologique) devait être appliquée à la politique ... voici ce que cela donnerait

Si l'approche phénoménologique devait être appliquée à la politique, voici, question de mieux comprendre, ce que cela donnerait dans le cadre du débat sur le statut du Québec (Québec souverain versus Québec au sein du fédéralisme canadien).

Premièrement, les partis s'opposant devraient se plier à confesser régulièrement et publiquement, que la position de l'autre clan est aussi valable que la leur. Ils devraient être ouverts à constamment revoir et réévaluer leur position et admettre que leur point de vue est influencé par la culture dans laquelle ils ont grandi (culpabilisation de l'identité culturelle). Le mot "parti" même, perdrait son sens.

Pour illustrer ce point, c'est comme si l'on demandait aux députés souverainistes de reconnaître périodiquement (pour poursuivre leur mandat de députés) que le souverainisme n'est pas supérieur au fédéralisme, et vice-versa. Serait-ce cela la liberté de conscience ? Non. C'est pourtant une confession équivalente qu'on exige des enfants dans le cours obligatoire d'Éthique et culture religieuse, de par la nature même de l'approche phénoménologique.

Et ce serait bien plus que qu'une déclaration vide. Ce serait en fait un pré-requis essentiel (éliminatoire) pour ne pas être exclus de la fonction politique, des débats ou du droit de parole. Partisans du souverainisme québécois et pro-fédéralistes seraient contraints à ne jamais avoir, hors des locaux de leur parti respectif (le pendant du lieu de culte) et de leur chambre à coucher avant la conclusion finale du débat, de position ou conviction ferme quand à l'option politique la plus valable à leurs yeux. Plus encore, ils devraient être en dialogue perpétuel, question de se faire une opinion la plus ouverte et la plus juste possible, jusqu'au stade des délibérations. Après cela (exemple : après les référendums perdus de 1980 et 1995), fini ! On n'en parle plus jamais. On irait d'une affirmation typique des déclarations publiques entourant la contestation populaire de l'imposition de l'ECR  : «Le Québec a décidé que ...», et ainsi de suite.

Deuxièmement, dans le cas des partisans et des politiciens, l'élite philosophique qualifierait des fédéralistes convaincus comme Stéphane Dion et des souverainistes comme Gilles Duceppe et Jacques Parizeau de déséquilibrés. Même chose, pour les bénévoles (volontaires) un peu trop zélés pour un parti politique. En effet, ils seraient, selon la phénoménologie, de ceux qui ont atteint le niveau de l'«équilibre rompu» et seraient donc coupés du débat, du droit de parole et de toute position d'influence. Lors d'une consultation publique, l'opinion de 100,000 péquistes (membres ou partisans du PQ) serait comptée par les commissaires menant les consultations, comme une position, comme cela a déjà cours au Québec pour la position autonome (conviction personnelle!) de 100,000 chrétiens sur l'euthanasie par exemple.


Délit de conviction


Pendant toute la période entre «dialogue», discussions, et vote final, les politiciens pro-fédéralistes et souverainistes et les nombreux bénévoles, devraient être ouverts à investiguer les différents systèmes politiques du monde. Et le fait de refuser de se plier à un tel exercice (même si plusieurs avaient déjà parcouru un chemin semblable) serait un autre critère éliminatoire pour participer aux débats ou pour conserver la fonction. Par exemple, on parle déjà au Québec et au Canada, de bannir des fonctions politiques les chrétiens engagés, pour délit de conviction.

Voilà le fruit de l'approche phénoménologique de l'étude des religions, si on appliquait la méthode à la sphère politique dans le contexte du Québec.

ECR : intrusion de l'État dans la sphère de la spiritualité et des religions


Je crois que vous avez compris : une confession idéologique qu'on n'oserait jamais imposer à nos politiciens (chacun étant convaincu que sa position est toujours la meilleure, même après délibérations et échec) est imposée sans aucune petite honte à des enfants et individus d'âge mineur et avec le plus grand mépris envers les parents; envers les rares parents informés et, mépris plus grand encore, envers les nombreux parents qui n'ont pas été bien informés dans la décennie qui a mené à l'ECR.

L'imposition du cours d'Éthique et culture religieuse à tous les élèves du Québec, particulièrement entres autres, avec l'approche phénoménologique, n'est rien de moins qu'une ingérence dans la sphère des croyances religieuses transportée pour le besoin de la censure, dans la salle de classe. L'exercice en apparence anodin est aux antipodes des libertés religieuses, morales et spirituelles. Voilà pourquoi l'élève doit mettre ses croyances et préférences ou valeurs à nu (ex. sexuelles, selon le cas médiatisé ces jours-ci) devant toute la classe. Ainsi confronté, l'élève dont les valeurs ne sont pas partagées par les autres subit d'énormes pressions psychologiques pour changer ses valeurs en l'absence d'encadrement et de ligne-guide des parents. Les parents, la famille et la culture, c'est ce que le programme considère comme l'esprit de clan. Dans les discussions et débats en classe, il est interdit d'accepter comme valables les valeurs de la communauté. Cela est banni sous l'expression de "l'appel au clan" dans les manuels. 

Donc, comme les leaders de certaines sectes, l'État pratique ainsi la technique de l'altération du lien parents-enfants.


Une rééducation comme en Allemagne (démocratique et très développée), de la première moitié du 20e siècle


La classe devient ni plus ni moins, qu'un camp de rééducation des cadets de l'État (les plus malléables et vulnérables), comme dans l'Allemagne du IIIe Reich et dans les anciens pays d'Europe de l'Est dont plusieurs doctrines politiques et sociales du 20e siècle ont échoué, soit-dit en passant ...

À LIRE sur le même sujet :

Il était une FOI : ou la fausse neutralité de l'ECR


__________________
NOTES :
1.  Dans le contexte québécois de plus en plus anti-catholique, les pratiques et techniques des religions philosophiques orientales et New Age ont la faveur et entrent dans les écoles et les milieux de travail. La foi chrétienne est méprisée alors que des professionnels de divers milieux croient aux horoscopes et aux nouvelles spiritualités. Cette nouvelle réalité atteint aussi le milieu scolaire. C'est pourquoi le contenu ou l'emphase diffère selon la classe et le modérateur (enseignant). Si certains se font neutres, d'autres font clairement voir leur préférence. Seulement pour cela, le cours pourrait être déclaré nul en Cour Suprême (non uniformité sur l'ensemble du territoire). La brèche est la latitude laissée en fonction du contexte (quartier, région, réalités spirituelles et religieuses de la communauté, etc.). Logiquement positive, cette latitude est récupérée par certains enseignants qui en profitent pour faire transparaître leur préférence, en choisissant habilement l' «informaiton» (tri des articles et dossiers médiatisés en fonction des conclusions désirées).

2.  PROULX, Jean-Pierre et al, Laïcité et religions. Perspective nouvelle pour l’école québécoise, Groupe de travail sur la place de la religion à l’école, 1999, p. 90.
(Ce rapport est mieux connu sous le nom de « Rapport Proulx »).

3.  OUELLET, Fernand et al (Comité sur l’éducation au phénomène religieux). L’enseignement culturel des religions. Principes directeurs et conditions d’implantationÉtude no 1. Gouvernement du Québec (Ministère de l'Éducation). 1999, p. 31, 81, 82.

     Étude 1 du rapport Proulx commandée par le Groupe de travail sur la place de la religion à l'école, coordonné par Monsieur Jean-Pierre Proulx, et réalisée par le Comité sur l’éducation au phénomène religieux dirigé par Monsieur Fernand Ouellet. C'est la principale étude soumise au Groupe de travail en 1998-1999. Entre autres, l'Étude no 1 a évalué des programmes existant au Canada ainsi que les approches américaines et britanniques. Sur la base de critères (principes) identifiés par le comité d'étude, ledit comité a arrêté son choix et sa recommandation pour un enseignement culturel des religions ayant été développé au Québec (1977) et testé de 1977 à 1984. Fait intéressant et plutôt particulier, un des cinq membres du Comité sur l’éducation au phénomène religieux (Monsieur Michel Trudeau) ayant participé à l'identification des critères recherchés et au choix du programme "idéal", était à la fois 1) membre dudit comité d'étude et d'évaluation des programmes existants et 2) co-rédacteur du programme-type recommandé.
     L'approche phénoménologique était celle privilégiée par ledit programme étudié et recommandé : «Son approche s’inspirait surtout de la phénoménologie» (Ouellet et al., 1999, p. 81).  L' Étude no 1 fournissait le squelette et le cadre pour les devis pédagogiques dont la réalisation est recommandée, pour ce qui deviendrait l'ECR. Ses conclusions apparaîssent au chapitre 9 du Rapport Proulx, pour le programme évalué et proposé (Proulx et al, p. 207-214) ainsi qu'en Annexe 1 dudit Rapport Proulx (p. 245-260)  pour ce qui concerne les lignes directrices et exemples de contenu du programme à implanter. En 2008, l'enseignement culturel des religions prévu initialement et fondé principalement sur l'approche de la phénoménologie (pour ce qui est du contenu de type religieux) était élargi au primaire et au secondaire et livré sous le thème du cours d' Éthique et culture religieuse.

4.  Jean-Pierre Proulx. ECR: approche laïque, erreur conceptuelle. Commentaire répondant à un article en ligne du journal Le Devoir. Inscrit le 28 juin 2010 à 11h31.
Article ayant suscité le commentaire : Julius H. Grey. Jugement Loyola - Le pire accommodement possible. LeDevoir.com, 28 juin 2010.
(il faut cliquer sur le lien «TOUS les commentaires», au bas de la page en question) :

5.  VAN DER LEEUW, Gerardus. La religion dans son essence et ses manifestations : Phénoménologie de la religion, Traduit par Jacques Marty. Paris, Payot, 1970. p. 516 (1933 pour la version originale, Phänomenologie der Religion).
     Le christianisme protestant, par exemple, est exclu d'office de la position d'équilibre, car il met généralement une emphase importante sur la foi personnelle plutôt que sur la "guidance" de la hiérarchie du clergé. L'approche phénoménologique ne respecte pas la liberté de conscience dans ce cas précis comme dans d'autres (exemple : les catholiques ou orthodoxes qui le demeurent par choix et non plus simplement par le choix de leurs parents, ou les juifs, les adhérents de l'islam, ...).

6.  Ibid., p. 516; les individus engagés dans la foi sont considérés comme s'étant égarés par rapport à l'équilibre qui devrait demeurer un perpétuel dialogue ou une perpétuelle remise en question.

Une énygme :