mardi 3 janvier 2012

Bye Bye 2011; mon billet le moins essentiel

LE BYE BYE 2011 ET LA POLITIQUE

Pour reprendre une expression souvent entendue des participants à l'émission "Un souper presque parfait" de V, «C'est quelque chose qu'on pourrait servir un mardi soir» (ici du point de vue humour). Mais sous l'angle d'une revue de l'année, cette édition du Bye Bye était intéressante. J'avais pour ma part, émis le souhait qu'on y rit aussi de la gauche. Évidemment, on nous a servi un menu surtout pour gauchistes repus depuis des décennies, mais au moins, on a un peu remis en question l'idéalisme socialiste aussi, ce qui est exceptionnel pour la SRC (CBC francophone) des 25 dernières années. Intéressant, mais non essentiel, voilà ce qui résumerait ce qu'est devenue la tradition du Bye Bye.

Contexte : pourquoi une critique du Bye Bye?

Image extraite du sketch sur les nouveaux
députés du NPD (parti fédéral), élusen
grand nombre pour le territoire du Québec
en 2011.
Pour le bénéfice des lecteurs étrangers et des néo-Québécois, il est fréquent de parler de ce divertissement télévisuel annuel, même dans les pauses-café au travail. Il passe en première diffusion la veille du jour de l'an (31 décembre au soir à compter de 23 h, ou 11:00 P.M.) et correspond au passage à la nouvelle année. On se permet souvent un petit regard critique, vu qu'y sont investis des dollars de nos précieux impôts et taxes (TV d'État fédérale). Si les producteurs sont autonomes (à ce que j'ai cru comprendre en décembre), explication donnée lorsque les producteurs refusaient les entrevues à certains médias, le financement de cette revue de l'année n'est cependant privé qu'en partie seulement. Le Bye Bye de fin d'année est devenu d'intérêt, non seulement parce qu'il constitue un retour humoristique sur l'année qui s'achève, mais aussi parce qu'il présente une certaine lecture de la culture québécoise francophone via les évènements de l'année. Il est souvent attendu, parce que dans le contexte d'une minorité francophone d'Amérique du Nord, il constitue en quelque sorte, un miroir tantôt caricatural, tantôt réaliste de nous-mêmes, des valeurs qui animent nos artistes et le média porteur (SRC), donc en partie, de nous-mêmes, en tant que peuple francophone du Québec, de descendance française.

En vrac

Quand j'ai noté qu'on ne riait pas beaucoup finalement, pour un exercice de divertissement de cette envergure, marquant le passage de l'année, ma femme m'a rappelé que c'est quand même une revue de l'actualité, et que cela limite la liberté du choix des thèmes de l'exercice. Bon, je concède à ses remarques. Mais je rie souvent plus lorsqu'occasionnellement j'écoute dans l'auto, un épisode de "À la semaine prochaine" à la radio de la SRC le samedi. Je précise donc, vu que c'est en bonne partie l'argent des contribuables qui finance cette production annuelle: il ne s'agit pas de remettre en question le talent des créateurs artistiques (tout le monde sait que Véro et Louis Morissette ont  du talent dans le showbizz), mais quand on se disperse partout dans divers shows de TV à l'année, on comprend que le Bye Bye finit par ne pas être si drôle que ça. Il y a des limites à ce qu'une poignée d'auteurs peuvent faire, s'ils sont aussi éparpillés dans une multitude d'autres projets. Pour reprendre une expression souvent entendue des participants de l'émission "Un souper presque parfait" de V, «C'est quelque chose qu'on pourrait servir un mardi soir» (du point de vue humour). Mais sous l'angle d'une revue de l'année, c'était intéressant. Non essentiel, mais intéressant. 


Intéressant, mais non essentiel

Intéressant, mais non essentiel, voilà ce qui résumerait ce qu'est devenue la tradition du Bye Bye. Une revue annuelle qui a cependant fait sourire, ou même rire à quelques reprises. Il n'y avait pas beaucoup d'instants hilarants, mais c'était un revue de l'année intéressante, un reflet d'une partie de la culture québécoise. Une des fois où j'ai le plus ri, c'est malheureusement dans une publicité (une vraie pub) de Familiprix mettant en scène une équipe de hockey sur glace qui vient de gagner la coupe. Un jeune joueur de l'équipe victorieuse a attrapé un énorme herpès à la lèvre, car tous les joueurs ont embrassé la coupe.

Pouvoirs politiques

Les politiciens élus démocratiquement devraient prendre note de la perception qu'ils laissent, à tort ou  à raison, pour 2011 (maire Gérald Tremblay de Montréal, maire Régis Labaume de Québec, Premier ministre du Québec Jean Charest, Premier ministre du Canada, Stephen Harper, Amir Khadir député du parti Québec Solidaire). Les politiciens non élus (hauts fonctionnaires de l'État) devraient aussi prendre des notes, par exemple, sur le ras-le-bol croissant, de se renier en tant que culture, incluant le retrait du mot Noël du vocabulaire. On commence à se rendre compte qu'il y a un gouvernement parallèle, les technocrates et spécialistes (fonctionnaires ou consultants) qui survivent aux élections et n'écoutent pas. Ce sont les penseurs de ces réformes qui finissent dans un mur. La preuve que les "spécialistes" au pouvoir ne garantit pas le succès.  Les anciens philosophes se sont parfois trompés dans leurs théories sur l'État. C'est pas mal plus complexe qu'une parabole sur la direction de l'équipage d'un navire datant de l'Antiquité. Et pour le Québec, il est possible d'être inclusif et accueillant, sans se renier et avoir honte de sa culture. Prétendre le contraire est une insulte à l'intelligence.

Mes deux sketchs préférés : 

  • le Boot camp de Thomas Mulcair, appelé M. Musculair par une nouvelle député du NPD et 
  • En direct de l'Univers (une parodie de "En direct de l'univers de", animée par France Beaudoin), sur le thème des syndicats de la construction, dont les méthodes s'apparentent drôlement  tristement à celles de la mafia italienne

Le Boot camp de Thomas Mulcair

Un des meilleurs sketchs politiques à mon avis, le boot camp de Thomas Mulcair pour les nouveaux députés du Québec élus au NPD (élection fédérale du 2 mai 2011)
- dont plusieurs ont voté pour la première fois (chanson du personnage de Thomas Mulcair)
- et qui ne savent pas où est la gauche (valeurs gauchistes)
- une classe d'élèves indisciplinés (reflet de la société québécoise?)
- députés socialistes qui sont pour faire payer davantage les "plusse riches" (les coûts de notre social-démocratie qui cumule déficit sur déficit), mais qui en voyant leur chèque de paye, changent la définition fiscale de "plus riche" en disant que le salaire d'un "plusse riche", c'est supérieur à 157,731$ (par année).
Bye Bye 2011. Revue de l'année de la Société Radio-Canada (SRC). Ici une scène du sketch sur les nouveaux députés du NPD (un parti fédéral) pour le territoire du Québec en 2011. Le Boot Camp de Thomas Mulcair. J'ai particulièrement aimé. Après avoir clâmé «Faisons payer les plus riches! Faisons payer les plus riches!» et en voyant leur chèque de paye, les
nouveaux élus socialistes changent, en pleine entrevue médiatique, la définition de "plus riche".
Le message politique

On peut lire entre les lignes, que le Plateau espère (et prépare) le retour en force du Bloc Québécois à Ottawa. Ce parti a encore beaucoup d'appuis dans les médias du Québec, particulièrement à la SRC. C'était encore plus palpable, lors de la soirée des élections du 2 mai 2011, alors que le NPD remplaçait le Bloc comme opposition officielle à Ottawa. La soirée électorale était en deuil, à la SRC.

Avec cette édition 2011, l'équipe SRC (CBC francophone du Québec) a fait des efforts pour oser tirer sur des valeurs socialistes clichées comme on en entend à la semaine longue sur ses ondes et dans ses médias (radio, TV, internet) le reste de l'année. Mais c'est pour mieux positionner le Bloc Québécois (au fédéral) et le Parti Québécois (au Québec). On nous suggère que le parti NPD, un parti fédéraliste non centré uniquement sur les attentes du Québec, devrait normalement ne pas être reporté au pouvoir après quatre ans (chanson Why NPD, sur l'air de YMCA de l'ancien groupe Village People). Et via le personnage du superhéros, Capitaine Solidaire (Amir Khadir) qu'il faut résister à la tentation de voter Québec Solidaire, pour centrer les forces sur le Parti Québécois. Les dénominateurs commun aux deux:
-  parti souverainiste
-  avec pour chef potentiel et anticipé, Gilles Duceppe.

Cela explique le tir groupé contre une certaine gauche, à l'encontre d'une longue tradition de la SRC.

Construction publique et syndicalisme : collusion et corruption au menu

Sur la collusion présumée dans l'industrie de la corruption construction, il y avait aussi de bons gags (ou clins d'œils). Les menaces des syndicats (ex. FTQ Construction) dans une chanson doucereuse, via la personnification de la chanteuse Cœur de pirate invitée à "En direct de l'Univers", sous la thème "l'univers des dirigeants de la FTQ", était une excellente satyre contre le syndicalisme extrême. La jeune chanteuse aux yeux d'enfants et à la voix douce fait les menaces les plus dures aux travailleurs qui refuseraient d'écouter les syndicats. Pendant ce temps, les leaders syndicaux sont touchés aux larmes par ces rimes qui les renforcent dans leur convictions et méthodes mafieuses. Fiction ou réalité? La ligne est mince; disons les deux? 

Voilà que tu manges un petit coup de pelle
Je démolis ta gueule, c'est rien de personnel
Puis, tu me supplie de te lâcher
Que tu as bien compris, en bon syndiqué
J'espère que c'est clair pour très longtemps
J'ai pas jusse ça à faire, arracher des dents
C'est moi qui mène sur le chantier
Sinon dans le ciment, tes pieds seront coulés
Tu te plains encore
Et moi je te bûche un peu plus fort
Si tu cries encore
Tu vas nager au fond du Vieux-Port 
(extrait du sketch à chansons, 
"En direct de l'Univers", du Bye Bye 2011, Société Radio-Canada -SRC) 

Les syndicats devraient prendre note qu'ils ont perdu la faveur populaire de façon progressive aux cours des dernières années. La perte de confiance n'est jamais bonne quand le donneur d'ouvrage est l'État, donc les contribuables... Et ce n'est pas bon non plus, pour les nouveaux projets de syndicalisation qui répugnent aux travailleurs qui craignent de déléguer leur autorité à une entité décrochée. Le syndicalisme n'évolue pas en même temps que le contexte social. "Rambo", le fier à bras syndical de la Côte Nord, à la mèche courte est passé dans l'imaginaire québécois, mais comme le type de leadership syndical dont on veut se libérer. Un autre point de perdu pour le syndicâlisse syndicalisme. 

Les fausses publicités

Celle de la "crègne" (crème, mal prononcé) par une personnification d'un chef cuisinier (Louis-François Marcotte) d'une série télévisée de Canal Vie, était plutôt drôle.  De même que Farmalpris (parodie d'un commanditaire, une pharmacie, drogstore) avec sa série "on se met à votre place". Dans la pub destinée à l'enquêteur Duchesneau (ex-chef d'enquête sur la collusion dans la construction publique), ce dernier, dans son propre rôle, passe chercher ses comprimés contre le stress, lui qui aurait pu devenir une cible réelle, si la construction est vraiment (ce que l'on croit ) infiltrée par le crime organisée.

Les bizarres

Message politique sur la mort de Ben Laden (Al-Qaïda) et de Kadhafi (Lybye): on ne sait pas trop où ils vont avec cela. Probablement qu'ils veulent dire qu'on est naïf de croire que le monde va devenir meilleur (mini comédie musicale "Tué par une balle", avec une jeune mère qui peut ensuite passer en poussette avec son bébé et une démarche joviale typique du genre). On peut répondre que les auteurs devraient cesser de tondre leur gazon, puisqu'il repousse tout le temps et que c'est donc illusoire de penser qu'il cessera de pousser. Rappelons en passant qu'Ossama Ben Laden ne représentait aucun gouvernement; tout comme Al-Qaïda. Tandis que Mouammar Kadhafi n'a pas été tué par des occidentaux.

Gouvernement parallèle

L'album de chansons "Non, non, c'est pas Noël", version fonctionnaires (technocrates) du gouvernement, était proche de la réalité. À enlever tout ce qui est spécial dans la fête qui fait partie de la culture québécoise, il ne reste plus rien d'un album de Noël. Le Bye Bye a fait la même lecture que nous : il y a des limites à s'excuser d'être ce que nous sommes en tant que culture québécoise; représenté ici par un album de Noël dont les chansons ont été épuré du mot Noël et qualifié d'entièrement "Jesus free" (épuré de toute trace de christianisme). On se rappellera que les chansons des centres de garde de la petite enfance (garderies, centre de puériculture) sont épurées des références chrétiennes depuis 2011; ex. ne plus chanter Au clair de la lune, car contient l'expression "pour l'amour de Dieu".

Le quota de jurons? Objectif atteint!

Le quota de jurons (à croire qu'il y a un nombre minimal à placer) a été atteint, en partie à l'aide de Jean-François Mercier, du personnage de Michèle Richard avec la biographie autorisée de sa vie réelle et imaginaire, et du personnage d'Elvis Bob Gratton, qui dirige  une séance de photos du Premier ministre du Canada, Stephen Harper (PCC). Jean-François Mercier revient progressivement au sein de l'équipe du Bye Bye, via la parodie de Tintin (nommé Kinkin; en joual, lire: tiens, tiens!), dans le rôle du capitaine Hadock (nommé Y Bock; en joual, lire: il s'accroche à son idée, bonne ou mauvaise).

Pour un observateur étranger qui voudrait comprendre notre culture, nous pouvons apparaître comme un peuple incapable de parler normalement, sans décliner les saints et accessoires de la messe catholique (jurons).

Tintin au Québec: le Plan Nord (du PLQ)

Le personnage repris de Tintin (inspiré du nouveau film) sert à soulever des doutes contre le Plan Nord (la trouvaille du gouvernement PLQ en 2011). Comme toujours, tout projet de développement est devenu, par défaut, suspect, soit
- destructeur de l'environnement ou
- destiné à vendre à rabais (piller) les ressources du Québec.

Enfin

Il y avait plus de contenu (thématiques) dans le Bye Bye 2011. Mais un article ne peut évidemment pas tout inclure.

Changement de trio

Personnellement, je crois qu'on ne devrait pas confier plus de 3 années consécutives (3 "mandats"), la revue de l'année Bye Bye à une équipe de production, question de changer la "couleur" ou "lecture" des évènements. Mais ce ne semble pas être l'intention de la direction de la SRC.  Cela finit donc par ressembler à des contrats sans appel d'offres. Véronique Cloutier et Louis Morissette vont, une de ces années, entrer dans une série d'affirmations "mon dernier Bye Bye" comme la retraitée Dominique Michel. Pour moi, c'est décidé, plus question de me coucher aux petites heures du matin à l'avenir, simplement pour écouter cette revue de l'année. J'écouterai un enregistrement ou la reprise, si requis.

Une question contractuelle (droit corporatif)

Il reste une chose à clarifier suite à la saga des refus d'entrevues en décembre ciblant les médias en compétition avec Radio-Canada. Les producteurs de semblables émissions annuelles de divertissement à la SRC, sont-ils des producteurs indépendants qui vendent un produit clés en main, ou des employés de la Société d'État? Parce que s'ils sont producteurs indépendants, cela n'impliquerait-il pas des appels d'offres?

Autre texte : 

Mon dernier "parler" du Bye Bye 2011: MILITANTISME ET "MODÈLE" QUÉBÉCOIS

http://yapasdpresse.blogspot.com/2012/01/mon-dernier-parler-du-bye-bye.html
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Principale source citée
Bye Bye 2011. Société Radio-Canada, 2011, durée approximative 58 min. (publicités incluses).